Twilight 1 : avis mitigé

Invitée à la projection de presse de Twilight, j’ai découvert la saga avec ce premier film signé Catherine Hardwicke. Mon avis mitigé écrit à l’époque sur le premier épisode d’une franchise qui s’est avérée lucrative.

Inspiré du roman éponyme de Stephenie Meyer, qui est à l’origine d’un véritable phénomène aux États-Unis, Twilight est-il à la hauteur de son succès surprise au box-office américain ? Pas vraiment.Malgré le choix intéressant de Catherine Hardwicke à la réalisation, Twilight évacue les ambiguïtés inhérentes au mythe du vampire au profit d’un traitement de l’histoire d’amour totalement dénué de lyrisme et de sensualité.L’emballage soigné et les notes d’humour ne suffisent pas à sauver un scénario qui se complaît dans un simplisme atteignant son paroxysme dès lors qu’un semblant de danger tente timidement de pointer le bout de son nez. Une belle occasion manquée de faire vibrer notre fibre romantique.

Lors de sa sortie aux États-Unis le 17 novembre 2008, Twilight a engrangé plus de 150 millions de dollars de recettes en un mois, pour un budget n’atteignant même pas les 40 millions – oui, Twilight est un film à budget modeste, contrairement à ce que la presse a tenté de nous faire croire par la suite. La réalisation de Catherine Hardwicke a fait beaucoup parler d’elle sur le continent américain et peut se vanter d’être l’un des films les plus rentables de 2008. Un phénomène qui s’explique aussi par l’aura déjà très forte de l’oeuvre d’origine, la série littéraire de Stephenie Meyer, dont le dernier volume a dépassé les ventes des Harry Potter.

Mais à l’arrivée, ce premier opus de ce qui s’avère être une franchise (le second épisode, intitulé New Moon, est déjà en préparation) est-il à la hauteur de son succès ? Rien n’est moins sûr et même avec les meilleurs préjugés du monde, il en faudra malheureusement un peu plus pour réveiller notre fibre romantique. De la part de la cinéaste qui signa il y a quelques années le très choc Thirteen et le très estimé Les Seigneurs de Dogtown, on s’attendait à quelque chose de plus étincelant.

Pourtant, Twilight aurait pu être un très joli film, avec son histoire de lycéenne taciturne qui tombe amoureuse du garçon le plus admiré et le plus inaccessible de la classe, avant de s’apercevoir qu’il ne s’agit ni plus ni moins que d’un vampire. Leur première gêne part du désir qu’ils se vouent l’un à l’autre, de quoi agrémenter le quotidien de Bella (Kristen Stewart) qui commençait justement déjà à s’ennuyer dans la petite bourgade où elle venait d’emménager. Un pitch pas plus bête qu’un autre, plein de promesses pour le public des 12-18 ans auquel le film est destiné, et avec un peu de chance propice à toucher l’adolescente fleur bleue qui sommeille en nous.

Malheureusement, Catherine Hardwicke ne tire pas parti des possibilités du scénario et s’en tient à un traitement désespérément tiède. Alors qu’une série télévisée destinée à la même tranche d’âge telle que Buffy contre les Vampires exploite habilement le mythe des créatures de la nuit pour conter les doutes existentiels de l’adolescence, notamment ceux liés à la sexualité, Twilight troque les ambiguïtés pour une bluette sentimentale peinant à décoller, noyant la thématique du désir et de l’interdit dans un festival de dialogues démonstratifs. Rien de désagréable à suivre, mais pour ce qui est de la sensualité, l’encéphalogramme reste désespérément plat.

De même, alors que les sentiments de la jeune fille pour son bel Edward (Robert Pattinson) témoigne d’une certaine attirance pour la mort, l’univers narratif et l’esthétique ne suivent pas et à aucun moment le film ne laisse poindre une quelconque noirceur. Quant au caractère marginal des personnages, il ne faut pas trop en attendre puisqu’il se résume au goût de Bella pour la lecture et à l’intérêt d’Edward pour la musique symphonique (car si un jeune écoute du Debussy, c’est très suspect, cela prouve qu’il vient d’une autre époque).

Il faudra donc rester dans un état d’esprit résolument premier degré pour éviter l’ennui qui menace peu à peu de prendre le dessus sur le semblant de mystère émergeant au début du film. L’entreprise est heureusement sauvée par quelques notes d’humour bienvenues, aidant la plupart du temps à faire passer l’absence de réel développement des personnages. De même, le film bénéficie d’un style visuel certes peu original mais agréable à l’œil, autorisant quelques plans réussis sur les visages des comédiens.

On relèvera tout de même quelques ratages du côté des maquillages, le fond de teint blanc des vampires offrant parfois un résultat pour le moins détonnant. Malheureusement, si les prestations honnêtes (mais pas renversantes) de Kristen Stewart et Robert Pattinson (Harry Potter et la Coupe de Feu) permettent à l’histoire d’amour de Bella et Edward de tenir à peu près la distance, Twilight s’embourbe dès lors qu’il tente d’introduire un simulacre de danger à travers une galerie de méchants complètement à côté de la plaque.

A ce titre, s’il fallait décerner un prix du bad guy le plus comique de l’année, le vampire nomade répondant au doux nom de James (Cam Gigandet) pourrait largement prétendre au titre d’honneur, le bonhomme se contentant de nous resservir systématiquement la même grimace chaque fois que la caméra s’attarde un tant soit peu sur son cas – il faut dire peu digne d’intérêt.

Ajoutons à cela un dernier tiers bâclé sur le plan scénaristique, entaché qu’il est par quelques prises de décision invraisemblables de la part des héros. Ainsi, alors qu’il nous faisait une belle démonstration de vol en plein air façon Tigre et Dragon vingt minutes plus tôt, lorsqu’Edward est contraint de s’enfuir en urgence avec Bella, il préfèrera étrangement à ses pouvoirs surnaturels l’emploi de la voiture…

A l’arrivée, Twilight a tout du film plaisant à regarder car joliment emballé, mais pêche par une totale incompréhension du concept de romantisme. Parmi les récentes tentatives cinématographiques explorant la relation vampire/humain, nous ne cesserons jamais de le répéter mais c’est incontestablement vers le superbe Morse de Tomas Alfredson qu’il faudra se tourner.

Bella et Edward

Néanmoins, qu’il soit justifié ou non, le succès de Twilight mérite tout de même une petite digression. Après Sex and the City – Le Film et Mamma Mia!, Twilight est la troisième production de l’année ostensiblement destinée à un public féminin à cartonner au box-office. Ça n’a l’air de rien, mais ces succès pourraient avoir quelques implications. En effet, il suffit de jeter un coup d’œil au classement des plus gros succès des années voire des décennies précédentes pour réaliser que ceux-ci s’adressent principalement à un public masculin, en plus d’être bien souvent dominés de manière écrasante par des rôles d’hommes. D’où la frilosité des producteurs à investir dans des films destinés en priorité à un public féminin, voire dans des têtes d’affiche féminines.

Avec ces trois succès destinés à des tranches d’âge variées (les trentenaires pour Sex and the City, les femmes d’âge mûr pour Mamma Mia!, les adolescentes pour Twilight) mais ayant visiblement réussi à transcender leur public, il y a bon espoir qu’une évolution s’amorce dans l’univers très « androcentré » des blockbusters américains. L’avenir nous le dira.

Elodie Leroy

Article publié sur Filmsactu.com le 17 décembre 2008

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